samedi 18 décembre 2004

Salam Aleikoum!

Ce matin, en terminant le boulot, je n’avais qu’une idée en tête : me vautrer au plus vite dans mes couvertures et me payer dix bonnes heures de sommeil bien mérité. Quand Didi m’a invité à aller déjeuner avec lui, j’ai d’abord refusé, mais devant son insistance, j’ai fini par accepter.

Didi a l’âge de mon père et il est d’origine algérienne. Cet homme est un musulman comme il s’en fait peu. Parfois, il me raconte les concerts rock qu’il allait voir quand il habitait en Angleterre, il y a de ça plusieurs années. Ou bien il m’écoute lui parler de mon expérience en Israël. Ensemble, nous parlons souvent de la guerre, des politiques internationales, du racisme, de la violence. Souvent, nous comparons la langue arabe et l’hébreu, et chaque fois nous sommes surpris de constater à quel point les similitudes sont flagrantes. Un jour, il m’a prêté une revue politique franco-arabe dans laquelle il y avait un article sur les jeunes Israéliens qui se retrouvent en prison parce qu’ils refusent de faire la guerre. Un autre jour il m’est arrivé avec des photos du mariage d’une nièce. C’était au Maroc je crois. Sur un des clichés on voyait Didi, son épouse, la nièce en question et l’époux de celle-ci… avec un kippa! Il est de ces images qu’on n’oublie jamais, celle-ci en est une.

Ce matin, en mangeant sa double portion de bacon(!), mon ami m'a raconté cette fois où des gens avaient été étonnés de le voir avec une amie juive, en train de s'embrasser en se souhaitant Joyeux Noël.

Il y a une heure j’étais assise en face de cet homme, dans un petit resto de la rue Saint-Denis, à parler de nos espoirs de paix au Proche-Orient, à espérer ensemble que la guerre en Irak ne déborde pas jusqu’en Iran, à se méfier ensemble des nouveaux riches que sont les Saoudiens. Quand je suis avec lui, je ne suis plus une Québécoise issue du judéo-christianisme et il n’est plus pour moi un musulman d’origine algérienne. Il n’y a pas de différence entre nous. Nous sommes tous deux des citoyens du monde qui rêvons à la paix. Et ça fait du bien!

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samedi 4 décembre 2004

Question de perspective

Lorsqu’on est en voyage, on a souvent tendance à devenir plus contemplatif: un arbre, un coquillage ou un immeuble suffisent parfois à éveiller notre imagination, voire une forme de méditation. Je me rappelle un soir, j’étais assise seule au bord de la mer et j’observais le coucher du soleil. Les fesses dans le sable encore chaud, les orteils dans l’eau fraîche et les yeux rivés sur l’horizon, je ne pensais à rien. Je me contentais de regarder le cercle orangé se rapprocher lentement de l’eau pour ensuite être graduellement avalé par elle. Ce n’était rien de plus qu’un petit moment de bonheur tranquille jusqu’à ce que je fusse prise d’un effroyable vertige. Le soleil ne bougeait pas, mais pas du tout. C’était moi et ma petite planète qui tournions. Du coup, je me sentis reculer. Pire encore, je réalisai que j’en avais encore pour dix bonnes heures à reculer avant que le soleil ne se repointe dans mon dos. La terre ne m’était jamais parue aussi grande, et la nuit aussi longue. J’ai cru un instant que je ne me débarrasserais jamais de cette impression de recul.

J’ai quand même trouvé le courage de me lever et j’ai fait demi-tour.

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