mardi 27 mars 2007

La libertà dell'uomo moderno

Je débarquais tout juste à Milan, escale nécessaire dans mon road trip en direction du chaud soleil de l'Espagne, accompagnée d'un pote ukrainien. On nous avait informés qu'il y avait une auberge à l'autre bout de la ville où nous pourrions passer la nuit. Malheureusement, tous les bureaux de change étaient fermés et, outre une poignée de shillings autrichiens, nous n'avions que quelques billets de 20$US sur lesquels le contrôleur du métro refusait catégoriquement de nous rendre la monnaie. De retour dans la rue noire et glaciale, il nous avait fallu aborder les rares passants pour leur demander de bien vouloir nous échanger un billet vert contre des lires italiennes jusqu'à ce que nous trouvions un gentil petit couple qui nous offrit généreusement deux billets de métro.

À l'auberge, le type derrière le comptoir avait d'abord refusé de nous offrir le gîte parce que nous n'avions pas de carte de membre, puis il avait consenti à fermer les yeux à condition que nous ne restions qu'une seule nuit, en nous intimant de faire vite parce que les lumières s'éteignaient dans cinq minutes. Je n'ai jamais mis les pieds dans un centre de redressement, mais je peux difficilement imaginer que ce soit pire que cette auberge: couvre-feu à minuit, aucune pièce commune, aucun fumoir, dortoirs séparés pour hommes et femmes avec gardiens de sécurité à l'entrée et alarme générale à 6h30 pour la prise du petit-déjeuner gracieux consistant en un bout de pain blanc et un café fortement dilué.

Mon ami et moi étions d'accord pour quitter la ville au plus vite, mais comme le prochain bus en direction de Lyon n'était que le lendemain soir, il nous fut nécessaire de déposer nos gros sacs en consigne à la gare et de ne garder que nos guitares et un petit fourre-tout pour les prochaines 36 heures. À la nuit tombée, nous avions du mal à tenir sur nos jambes et tentions vainement de trouver un endroit hors de vue des milliers de caméras qui espionnnent chaque coin de la ville. Dès que nous osions nous reposer les yeux quelques secondes, assis sur un banc glacé, un policier arrivait, inspectait nos maigres bagages et nous demandait de circuler. Nous avons «circulé» ainsi de 8h le matin jusqu'à 19h le lendemain…


Pourquoi je repense à cette histoire aujourd'hui? Probablement parce qu'à Milan, il y a six ans, j'ai eu l'impression d'être un personnage de George Orwell. Et qu'aujourd'hui, au lendemain des dernières élections provinciales, il me semble entendre le claquement des bottines de Big Brother se rapprocher.

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vendredi 23 mars 2007

Yulblog version trash

Aucun lien avec l'actualité, mais le beau temps s'en vient et j'ai bien hâte qu'on remette ça.

Avouez qu'on est mignon tout plein!

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mardi 20 mars 2007

Galad et le service à la clientèle

Voilà déjà plusieurs mois que ça dure. À tout bout de champ, la télé se remplit de neige et l'accès à internet devient impossible. Depuis Noël, les trois techniciens qui sont venus à la maison se sont contentés de changer notre modem. Prenant mon courage à deux mains, je m'installe au salon avec des provisions suffisantes en eau potable et en collations diverses et compose le numéro du service à la clientèle de Vidéototon:

- Bienvenue au service à la clientèle de Vidéototon... Votre appel est important pour nous... For service in english, press nine... Pour profiter de nos récentes promotions, faites le 1... Pour nous féliciter pour la ponctualité de nos factures, faites le 2... et bla bla bla... Si vous avez des problèmes avec le câble, faites le 7... Pour les problèmes d'accès à internet, faites le 8... Pour réentendre les options...

- Bon, commençons avec le câble. Biiip.

- Un agent se libérera sous peu. Votre appel est important pour nous... Dans un souci d'améliorer notre service, il est possible que cet appel soit enregistré... Restez en ligne, votre appel est important pour nous...

Vingt minutes s'écoulent.

- Bonjou' comment puis-je vous aider?

- Bon, enfin! Ça fait plusieurs mois que l'internet nous lâche, mais depuis un certain temps la télé est affectée aussi. Tout porte à croire que le signal n'est pas assez fort.

- Je ne vois aucun p'oblème Madame. Ça doit venir de votre magnétoscope. B'anchez le câble directement sur votre téléviseu' et tout rentrera dans l'ordre.

- Écoutez, si c'était le cas, je ne perdrais pas l'accès internet en même temps...

- Je ne m'occupe que du câble, Madame. Pour vos problèmes d'internet, je dois vous communiquer avec un confrère. Clic. Un agent se libérera sous peu... Votre appel est important pour nous... Dans un souci d'améliorer notre service, il est possible que cet appel soit enregistré...

- Eh merde! Ça recommence...

Un autre vingt minutes s'écoule. Ça semble être la norme. Je me félicite d'avoir pensé à remplir le bol du chat. N'ayant ni télé ni internet, j'écoute la radio d'une oreille en me tapant le message préenregistré de l'autre quand une voix humaine (mais pas trop) me sort de mon coma:

- Bonjour comment puis-je vous aider?

- Je vous préviens tout de suite: si vous me remettez en attente, je ne réponds plus de mes actes...

- Quel est votre problème Madame ?

- Eh bien, outre votre service à la clientèle absolument merdique, il y a le service internet qui arrête par intermittence...

- Ça doit être votre modem, Madame.

- Le modem a été changé trois fois déjà et si c'était la source du problème, la télé ne nous lâcherait pas en même temps.

- Je ne m'occupe que des problèmes internet, Madame. Pour le câble, je peux vous communiquer avec...

- Il est hors de question que vous me communiquiez avec qui que ce soit!

- D'ici, je ne vois aucun problème avec votre connexion internet.

- C'est parce que le service a eu le temps de revenir depuis les trois quarts d'heure que je suis en ligne! Vous devriez bien voir à mon dossier que trois techniciens sont venus depuis deux mois. Je n'invente rien...

- Je suis désolé Madame, mais je ne vois rien d'anormal d'ici. Il faudra nous rappeler quand ça ne fonctionnera pas. Bonne fin de journée madame. Clic.

- ...


* * *

Post Scriptum:

Le lendemain matin, mon homme a téléphoné à son tour et un technicien nous a été envoyé l'après-midi même. En moins d'une minute, le gros du problème fut réglé.

Dites, vous croyez que c'est moi qui ai un mauvais karma?

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lundi 12 mars 2007

Ni noir, ni blanc

Cher cousin,

Je dois avouer que j'ai été assez surpris d'entendre ton message ce matin. C'est flatteur, considérant que tu n'avais droit qu'à un seul appel.

Te rappelles-tu, cousin, quand tu me tabassais en me traitant de sale blanc parce que j'écoutais du French B et du Bérurier Noir à douze ou treize ans? As-tu le moindre souvenir de cette journée où, quelques années plus tard, toi et cinq de tes amis m'avez battu au sang parce que j'avais été élu meilleur élève de ma classe alors que vous traîniez déjà dans les rues? Ou encore, de la fois où tu as caché une arme dans mon sac à dos pour l'entrer à l'école sans éveiller de soupçon? où tu m'as menacé, avec la lame de mes patins, de me trancher la gorge si je ne promettais pas de ne plus jamais jouer à ce «sport de blanc» qu'est le hockey?

C'est déjà loin tout ça, j'en conviens, et ça ne m'a pas empêché de poursuivre ma vie comme je l'entendais. Pour répondre à ta question, oui ma carrière d'avocat va toujours bien. Mais non, je n'ai pas l'intention d'assurer ta défense lors de ton procès pour gangstérisme. Je ne voudrais surtout pas t'imposer la honte d'être défendu par un sale blanc...

Transmets mes salutations à tes copains.

Ronald

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vendredi 2 mars 2007

Galad change le monde

J'étais occupée à chercher un mot de dix lettres pour "insectes des eaux stagnantes" quand le jeune devant moi a jeté son journal par terre.

- Dis donc, tu t'attends à ce qu'on le ramasse pour toi, peut-être?

- Euh... Oui...

- Allez, ramasse ton journal.

- Sinon quoi?

- Sinon rien, sauf que je vais le faire à ta place et tu vas passer pour un bel imbécile devant tout l'monde.

Le boutonneux se penche et reprend son journal. Je retourne à mes mots croisés tout en le gardant à l'oeil. Deux stations plus loin, il s'assoit sur un siège qui vient de se libérer. D'où je me trouve, je vois très bien qu'il laisse hypocritement pendre son journal à quelques centimètres du sol. Notonectes! Je baisse les yeux dix secondes pour remplir quelques cases de ma grille et en les relevant je constate que le couillon a maintenant les mains vides. Je m'avance vers lui:

- Aurais-tu vraiment envie de vivre dans un monde où tous les gens jetterais leurs déchets par terre? Moi non.

Il a baissé les yeux et je suis sortie du wagon en fourrant mes trucs dans mon sac. J'aurai au moins essayé.

Eh bien croyez-le ou non, j'ai recroisé le jeunot en sortant de la station Laurier. Et il avait un journal sous le bras.

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